• Racontards

    L’Alchimiste

      Lucifer N’avait rien à faire Qu’a brûler du fer Dans son four en terre   Du fer blanc Pour le mal de dents Du fer à friser Pour les cors aux pieds   Un peu d’or Dans son athanor Et un feu d’enfer Pour tout l’univers !   *                   *   Mais le Bon Dieu Sous son chapeau bleu Ne l’entendait pas De cette façon-là   Sacrebleu S’écria l’Ancêtre Ce petit morveux Me casse les burettes   Je vais de ce pas Lui chercher des crosses Avec le papa De la fée Carabosse   *         *…

  • Racontards

    Au château de Sans-Souci

      Au Château de Sans Souci Ils sont arrivés à six Le Un croquait des knackis Le Deux suçait des sushis Le Trois venait en taxi Le Quatre et le Cinq aussi Ils tortillaient du coccyx Comme des poulets mal assis Mais nul là-bas ni d’ici N’avait vu passer le Six     Au Château de Sans Souci A l’heure de l’apéritif Un buvait du blanc cassis Et Deux cherchait des sushis Trois ronflait dans son taxi Plié comme une écrevisse Quatre et Cinq levaient la cuisse Pour danser le Sirtaki En se disant : Sapristi Mais où est passé le Six ?   Au Château de Sans Souci L’éclat du feu…

  • Racontards

    Choses ordinaires

    « Tu me dis : Laisse un peu l’orchestre des tonnerres Car par le temps qu’il fait il est de pauvres gens Qui ne pouvant chercher dans les dictionnaires Aimeraient des mots ordinaires Qu’ils se puissent tout bas répéter en songeant » Louis Aragon. Ce que dit Elsa Je voudrais des choses ordinaires Des trésors comme on n’en fait plus Des p’tits bonheurs des p’tites misères Du tout venant, du tout venu   Des enfants qui jouent dans la cour Qui viennent à l’heure de la récré Tracer des marelles à la craie Et sauter dedans tour à tour   Une fenètre ouverte sur Un coin de ciel au bout d’un toit Un…

  • De 17 à 25 heures

    Auprès de ma blonde

    Il a fallu plus de cent ans Pour que ma belle au bois dormant Oublie l’espace d’un instant Ses rêves de prince charmant Moi qui ne suis ni chevalier errant Ni troubadour, ni poète vraiment Qu’avais-je de plus qu’un passant ? Mais l’amour s’en allait chantant : “ Auprès de ma blonde je m’endors Je fais la nique à la mort ” J’ai failli voir s’ouvrir la nuit Au bord du gouffre de l’oubli Les voix que j’aimais s’étaient tues Jamais on ne s’y habitue Dessous des arbres gris aux doigts de fer Je cachais ma tristesse et mes hivers Mais quel était donc ce passant ? Voilà qu’il s’en allait chantant : “ Auprès de ma…

  • De 17 à 25 heures

    La chanson du soir

    Sur le bord des lèvres entrouvertes Se repose comme un lac d’eau Le doux balbutiement des mots Vallées, plaines qu’on aperçoit Rougeoyant des lunes de soie Sur les braises aux chenets des bois Où le cerf la nuit venue boit Pour les yeux des biches aux abois Des jeunes faons tremblants d’effroi Plaines, vallées qu’on aperçoit Je dirai la chanson du soir Sur le bord des lèvres entrouvertes Se repose comme un lac d’eau Le doux balbutiement des mots

  • De 17 à 25 heures

    Demain

    A l’aube du grand large endormi C’est le sommeil du rameur d’été sur la plage T’en souvient-il ? Il faisait un temps d’ambroisie avec Les vertes dragées pâles de tes yeux ouverts Sur une fenêtre au flanc du mur Et mon cœur voyageait sur un radeau Le radeau bouge et l’eau s’endort Très tôt, les prairies d’automne se sont envolées Avec leurs petits cris mouillés Hélas, le passant, derrière le vent s’enfuit Il passe, Rêve effacé Tendresse donnée, Ses mains plongées dans le ruisseau Qui n’en finit pas de couler Depuis le jour de nos funérailles communes

  • De 17 à 25 heures

    Eclaircie

    Là, au carrefour de nos regards enfin rejoints Je cherche encore les lagunes de fiel Qui t’emportaient S’en va pour jamais l’horizon liquide Où bouillonnait la querelle Les ronces à tes pieds, la colère à tes mains Ne reviendront jamais, que le vent les emporte                      * Reste là, comme l’hirondelle immobile Ne garde que tes larmes sur ton corps glacé

  • De 17 à 25 heures

    Sitôt que le jour s’est levé

    Sitôt que le jour s’est levé J’ai vu le vent grossir la mer J’ai vu se fâcher l’océan J’ai entendu gronder l’orage Je coursais, au loin, les nuages Chargés de lourds destins tragiques Si langoureux, si magnifiques, Qu’on voudrait suivre leurs voyages Je pensais, les poings dans mes poches -Et la mer déchirait les roches- A chevaucher vers les tropiques Sur des tempêtes fantastiques J’avais la tête ivre du large, Et mes pieds décollaient du sol C’est sûr, j’allais prendre mon vol Mais j’écrivais : “  peut-être ” en marge. Et ce “ peut-être ” m’a cloué Au quai, ballotté par les vagues Nul n’a tenté le mauvais sort Les barques sont restées au…

  • De 17 à 25 heures

    Les nuits s’ennuient

    Les nuits s’ennuient, les nuits se traînent Longues, longues, les nuits se traînent Se traînent jusqu’au matin blanc Le long du même chemin lent Un coche lourd et sans allant Suit son cheval indifférent Glissant sur le pavé luisant Sous la lune les nuits s’ennuient Ainsi je vais sans but et sans Passion comme vont les passants Je vais, je m’ensuis, je m’entends L’écho crier mon nom sans bruit Le bruit doubler mon pas d’absent J’attend l’aube qui toujours fuit Dans le secret des insomnies Frileux je me drape dedans Il n’y a pas de fin de nuit