• De 17 à 25 heures

    Il avait trop marché

    Il avait trop marché cette nuit de Noël Les rires des enfants ne l’accompagnaient pas Sous les gifles du vent, la griffure du gel Seul un chien vagabond s’attachait à ses pas Depuis trop de saisons il parcourait la plaine Se cachant dans la nuit, poursuivi des gendarmes Ses forces s’épuisaient, et sa peur, et sa haine Il rêvait d’un rivage où déposer les armes Il s’assit, planta son bâton, frotta ses mains En lui jetant des pierres il éloigna son chien Et puis il attendit drapé dans son manteau Que le froid peu à peu s’insinue dans ses os. Il se souvint d’un coin de ciel De l’autre côté…

  • De 17 à 25 heures

    Fatigue

    Je parle à l’envers de la feuille J’ai rimé toute la journée La plume noire dans l’encrier N’a plus le cœur de boire Les mots et leurs majuscules S’étirent comme des fils tragiques Mes mains s’appliquent lourdement sur les murs Et laissent une marque profonde Au milieu des fleurs déteintes La fumée de mes cigarettes Plane très bas Puis vient se poser sur le sol Elle exhale un tapis de laine De mille moutons éthérés. Je sens mon cœur Comme une bulle qui crève

  • De 17 à 25 heures

    Eclaircie

    Là, au carrefour de nos regards enfin rejoints Je cherche encore les lagunes de fiel Qui t’emportaient S’en va pour jamais l’horizon liquide Où bouillonnait la querelle Les ronces à tes pieds, la colère à tes mains Ne reviendront jamais, que le vent les emporte                         * Reste là, comme l’hirondelle immobile Ne garde que tes larmes sur ton corps glacé

  • De 17 à 25 heures

    A Duck

    Tout en bas du fleuve mauve Où rampe une allumette Une bougie plantée dans une table… Vous dansez ? Oui, je danse Chaque mouvement dans l’ombre Estompe les distances Les murs s’éclairent La cave s’enfonce Un peu en terre D’où remonte une eau sombre La cire qui fond brûle mes pieds Et sa chaleur remonte Le long de ma mèche Et mes cheveux s’enflamment -Oui, je danse Ton ombre brune Vacille Et m’emprisonne Fauves, des couleurs fauves Flottent sur ton visage Je vais chercher tes lèvres -Vous dansez ? 1976

  • De 17 à 25 heures

    Demain

    A l’aube du grand large endormi C’est le sommeil du rameur d’été sur la plage T’en souvient-il ? Il faisait un temps d’ambroise avec Les vertes dragées pâles de tes yeux ouverts Sur une fenêtre au flanc du mur Et mon cœur voyageait sur un radeau La radeau bouge et l’eau s’endort Très tôt, les prairies d’automne se sont envolées Avec leurs petits cris mouillés Hélas, le passant, derrière le vent s’enfuit Il passe,           rêve effacé                  tendresse donnée,                           ses mains plongées dans le ruisseau  …

  • De 17 à 25 heures

    Coq Hardi

    Vous me déplaisez Gens de toutes sortes Qui allez venez Qui passez la porte Regardez partout Timides, inquiets Ne sachant pas où Poser vos quinquets Plantés là debout Dans ce restaurant Tout en attendant Qu’on ait soin de vous Et moi je m’en fiche De votre embarras « Où poser mes miches ? Vais-je dîner là ? » Je suis amoureuse Du taulier d’ici Je bois ma chartreuse En rêvant de lui Ainsi soupirait La belle étrangère Filant des secrets D’amours adultères

  • De 17 à 25 heures

    Comme les chansons d’avant

    Comme les chansons qu’à peine on soupire Sans rien pouvoir dire J’ai fermé pour toi un livre d’amour Muet pour toujours Et vers l’océan filant sans retour Vers des mers absentes J’oublie sur ma peau tes lèvres d’amante A jamais toujours Mais pourquoi le vent Aux rives d’antan Accroche un reflet De frissons d’argent Mais pourquoi le temps Du passé présent Me parle d’autant Des amours d’avant

  • De 17 à 25 heures

    Club privé

    Pauvre Lélian Le temps… Je meuble chaque espace parcouru De mon regard morne d’un attrait supplémentaire à mon ennui Sur les visages se reflètent Les contorsions des lumières Dans une night club clandestin La nuit et ses étoiles se poursuivent De mille rires provocants Eclatent des œillades incendiaires Cob-la-fleur Et puis soudain Son sourire clair -Comme une fleur qui s’ouvre ! Entre le bar aux liqueurs Et le candélabre complice Me regarde La nuit à nouveau Je te suis, au bord d’un brouillard désert Où pas un soupçon ne plane Sur nos pas confondus Je garde comme un secret Entre la cage de mes doigts -Entrelac- ta main Que tu m’as…