De 17 à 25 heures

Poèmes écrits de 17 à 25 ans

  • De 17 à 25 heures

    Trust

    Marche marche ne t’arrête pas Pose un pied de plus sur le carrelage nu Dans les couloirs d’un hôpital de baltringues Sur ton t.shirt est tatoué : TRUST Pose un pied lent, pose un pied dur Marche, marche, ne t’enraye pas Les doigts noircis par des cigarettes de survie Coule le long des murs comme un eau qui bruisse Comme une rivière debout Marche et suit, une fois, deux fois Ton pas. Essuie ton pas. Ton ombre ne te rattrape pas Marche, marche puisqu’il le faut Une main lourde sur ton maigre dos Atlas qui porte le fardeau Du monde Marche hors du temps, marche hors du jeu Dans ce couloir…

  • De 17 à 25 heures

    Un grand viking

    Un grand viking aux terribles accents Martèle le bar de bois d’une soif impatiente Il s’encolère, il lève son bock vide Une autre ! Il hurle vers des bières d’écume blonde Qu’elles viennent s’enrouler dans sa gorge Où des vagues d’ivresse moutonnent. Une autre ! Il lève des bras immenses Des bras de sang et de carnage Une âme d’effroi dans ses yeux Une autre ! Et puis l’océan le rattrape Le happe au bord du bastingage Et il chavire doucement Les yeux noyés.

  • De 17 à 25 heures

    Dans les verres devins

    Dans les verres de vin, Il y a des vers devins Qui riment pour la frime De conjuguer amours et crimes Pour le compte de pieds de nez Qui dessinent des vers à pieds. Dans les verres déteints : L’envers de nos destins. Pauvres pensées permises Fausses roses promises. On s’imagine magicien, Prince au Parnasse ou assassin. Le long des vers, le vin ravine Et se décline au fond des gorges. Meurt un cri : que mon rêve arrive Rien n’émeut le Maître des forges Et moi, des pieds de plomb, n’ai plus Que le poids des espoirs reclus

  • De 17 à 25 heures

    Pour un bleuet, fleur séchée

    Pour l’amour d’un rêve J’ai lassé ma vie J’ai usé ma sève A soif assouvie J’ai bu la rosée Des aubes vermeilles L’âge des merveilles A source épuisée Tu cueillais en vain Mes augustes songes De ceux qui nous rongent A jamais demain Il n’y avait plus Ni l’ombre ni l’arbre Sur le froid du marbre A vie à trépas Pas même un frisson De fleur à ta bouche La faux des moissons A l’instant me touche

  • De 17 à 25 heures

    Naufrages

    Ciel d’amplitude maximale Aux airs gris et saumâtre Chaque brin d’herbe explose De scintillements de gouttes invisibles Toute la profondeur déchue des terres Remonte jusqu’au fond de la gorge Raclement d’ongles, spasmes morbides Doigts léchés sur des plaies Infinies crevasses à la surface des mers Noyades dans mes regards délavés Les éternels retours du jour sont naufragés Même le soir tombant est déchu Pas une éclaircie dans tes yeux L’étirement des ombres se fait languissante Il ne reste déjà plus d’odeurs de menthe Que ces frissons nordiques m’exaspèrent ! Et demain …

  • De 17 à 25 heures

    Petit ange de messe

    Garde l’équilibre Sur le grand escabeau des lampes d’allumage Marche sur l’horizon oublié Des sentiers où nos pas ne sont plus exactement sous nos pieds Mais beaucoup plus haut, et beaucoup plus loin Ne répands pas la vie que tu as versée Au creux de l’amphore des essences réunies Sous mes doigts, dans ta cage enfermé Je souffle et tes ailes tremblantes frissonnent Tout au fond d’un puits de silence Petit ange de messe tranché entre deux pages d’un livre Les pages-pièges à la tranche d’or Qui coupe Le livre s’endort sous le soupir grave de l’orgue Et l’ange fuit au fond de la nef indolente Tous les amours d’église…

  • De 17 à 25 heures

    Sur la place

    Sur la place Les façades des maisons se sont effacées pour qu’il passe, Sur la place au milieu Lui  L’espace. Tête nue sous la pluie muette, Il allait et son pas s’arrête L’instant d’une interrupture, Pendant que l’aiguille se brise sur la montre, Que le cœur du temps s’arrête Et qu’on n’entend plus le poids de la pluie qui pleure, Il ne bouge plus. Il allait. Ne va plus. Etourdi, cogné soudain par l’évidence De cette question qui frappe Et l’abat comme un arbre : A quoi bon ? Il secoue de son manteau de pluie Des étincellements d’eau : Tombent de ces petites étoiles mouillées, Inutiles. Comme sont les rêves mal éveillés…

  • De 17 à 25 heures

    Paris-Lorient

    Adieu, voici le soir venu, le temps La pluie aussi Me fouette ici Et là, dans l’air du temps passé déjà, pourtant Pas de larmes, surtout, inutile Ni de tendresse, ni de promesses La chasteté ? Un thé de vieux jupons anglais stériles C’est un départ sans billet pour ce soir L’un s’en va L’autre pas Nos routes vont s’enfuir jusqu’à l’infini Pas de violons surtout, les chants du violon j’interdis ! C’est un départ Le tien. Tu pars Ce n’est pas une affaire, dis ? Et le quai de la gare aussi, fatigué, usé Par les pieds de poètes au son des pas perdus Je jette Ma plume et sort, sort jeté…

  • De 17 à 25 heures

    On joue le dernier acte

    On joue le dernier acte On sera gai et outré On boira de tous les champagnes Il y aura des coupes dans chaque main Des rires cassants comme des vitres Dans chaque gorge Des femmes qu’on décidera : belles Des talons impatients Qui martèleront le sol Pour qu’il résonne Que la salle s’emplisse de bruits Jusqu’à ce qu’elle déborde Que tout ce qui est sonore vienne s’y cataracter On voudra danser Jusqu’à ce que les heures se lassent Jusqu’à épuiser le jour à naître Jusqu’à le vider de son impatience Qu’il demeure à jamais dans les limbes Et que cette nuit ne finisse pas Ce soir, on vous connaîtra tous On…

  • De 17 à 25 heures

    Mon étoile a pâli

    J’ai lu dans ton regard Quelque chose d’éteint. Pas encore de l’ennui Mais déjà du silence. Comme une douce lassitude. Comme la patine du temps. Comme l’or terni des alliances. Une ombre s’est glissée entre nous sans un mot Et tu ne l’as pas vue. Moi, j’ai fermé les yeux un instant sans rien dire J’ai su bien avant toi que tu allais partir.